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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/374

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dans une autre sans payer aucun des droits qui étaient dus sur la route. Mais, pour empêcher qu’on n’abusât de cette facilité en changeant la destination de la marchandise, on a exigé une caution solvable de l’engagement de payer le quadruple des droits dus, si cette marchandise n’était pas portée, sous un délai déterminé et assez court, dans le lieu pour lequel elle était destinée. On délivre à cet effet au négociant un papier qui s’appelle acquit-à-caution, et sur lequel le voiturier est obligé de faire mettre, par le commis des fermes du lieu de la destination, la mention de l’arrivée de la marchandise.

Cette faculté du transit était rendue générale par l’ordonnance de 1687 ; mais les fermiers-généraux ayant prétendu qu’elle donnait lieu à beaucoup de fraudes contre les droits, ils obtinrent la révocation de cette faveur si naturelle et si juste, et le transport des marchandises demeura assujetti à tous les droits intermédiaires. Il fut cependant fait quelques exceptions particulières pour des destinations qui parurent plus favorables. Les pays conquis en obtinrent une particulière, qui fut fixée par l’arrêt du 15 juin 1688, et confirmée par une foule d’autres jusqu’en 1749, pour la sortie des produits de leurs manufactures, et pour l’entrée des matières qui y étaient employées.

Il est à observer que ces arrêts, même en accordant le transit, ne permettent pas de faire entrer et sortir les marchandises par toutes sortes de routes indifféremment. Elles sont assujetties à passer par certains bureaux exclusivement à tous autres : c’est encore une gêne très-onéreuse que les fermiers des droits ont fait imposer au commerce, toujours en prétextant la crainte des fraudes et des abus ; mais il n’est pas question de réclamer contre cette gêne. La ville de Lille ne s’en plaint pas, et se borne à demander l’exécution des arrêts qui lui assurent la liberté du transit dans les termes les plus précis. Il est uniquement question de savoir si ces arrêts sont applicables aux droits qui se perçoivent à Lyon sur la soie. — Ce droit dont jouit aujourd’hui la ville de Lyon est un des droits de traite les plus onéreux, et par sa quotité et par la forme de sa perception, et par la matière même sur laquelle il tombe, qui est une de celles que consomment en plus grande quantité les manufactures les plus précieuses.

Comme pendant longtemps la plupart des soies venaient du Piémont, la ville de Lyon, placée très-avantageusement pour tirer cette