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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/846

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à la nomination de quelques familles, ces bourses se disputent au concours, et M. votre frère m’a dit que l’enfant n’était point encore assez avancé pour s’y présenter ; s’il y a quelque moyen de réussir dans la suite, j’y ferai, avec bien du plaisir, tout ce qui dépendra de moi et de mes amis. L’archevêque d’Aix est à présent à Paris ; vous aurez appris, par la gazette, le cordon bleu de son frère. C’est une grande joie pour eux, et, en effet, il était important qu’il eût cette petite fortune avant de présider aux États de Bretagne, pour qu’on n’y dise pas qu’il vendra la province pour avoir le cordon bleu. Sa santé est assez bonne.

Une autre nouvelle est l’arrivée de Voltaire à Paris, pour faire jouer sa nouvelle tragédie d’Irène ; je l’ai vu, et l’ai trouvé tel que je l’avais vu il y a dix-huit ans. Son arrivée fera un peu diversion aux disputes entre la musique de Gluck et celle de Piccini, qui ont divisé nos gens de lettres en deux partis aussi acharnés l’un contre l’autre que les jansénistes et les molinistes.

Vous m’avez demandé des nouvelles de Didon ; il était bien juste que mon nouveau loisir lui fût consacré ; aussi l’ai-je terminée entièrement, non sans quelque peine, car je n’avais jusque-là travaillé qu’à bâtons rompus, et quand j’ai voulu me commander de finir, j’ai vu que j’y perdais beaucoup de temps ; je ne suis pourtant point fâché d’avoir terminé ce travail, piquant par sa singularité.

M. de La Rochefoucauld a dû vous écrire sur la traduction du Voyage au nord de l’Écosse, que vous lui avez envoyée. Desmarets s’est chargé de veiller sur les gravures et sur l’impression ; malheureusement Desmarets est un peu paresseux ; il se laisse prévenir sur sa découverte des volcans, et un nommé Faujas va nous donner la description de ceux du Velay.

Je n’ai point eu occasion de voir M. de Vérac, parce que depuis qu’il est ici j’ai été retenu plusieurs mois chez moi par la goutte ; j’espère cependant le voir avant son départ pour Copenhague. Je profite de l’occasion d’un voyageur qui retourne à Berlin, et qui mettra cette lettre à la poste en Allemagne.

Nous sommes depuis quelque temps incertains entre la paix et la guerre ; toutes les circonstances tendent à la guerre ; mais il est vraisemblable que les deux cours craignent de s’y engager. Je crois que, quoiqu’il arrive, les Américains sont à présent assurés de leur liberté.

Adieu, monsieur : vous savez combien vous devez compter sur mon amitié.

fin du second volume et des œuvres de turgot.