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LES DEMI-SEXES

femmes et n’en souffraient pas, ayant eux-mêmes des goûts fort étranges.

Immobile, pâle sous ses pesants cheveux noirs, Nina, le regard fixé devant elle, attendait… Il y avait dans son visage immobile, dans tout son être inquiétant, quelque chose de nouveau, une de ces menaces d’orage qu’on devine dans les ciels brûlants.

Elles étaient presque toutes Parisiennes, ces femmes vaines de leur toilette et de leur corps, souples et dures sirènes, sans cœur et sans faiblesses, qui savaient créer les trésors de la volupté et contrefaire les accents de la passion.

Rieuses, elles s’empressaient autour de la table, comme des abeilles autour de la ruche. Bientôt, quelques cris éclatèrent ; le bruit augmenta, les voix se firent aiguës…

Une des plus charmantes idées de ce souper avait été de le faire servir par des femmes, pour qu’il ne fût pas dit que rien eût dérangé l’harmonie d’une fête dont les femmes étaient les seules reines. Le couvert était un chef d’œuvre de goût, de délicatesse et de recherches heureuses. C’est ordinairement le désir, l’espoir de s’amuser qui donne à souper ; ici, c’étaient la reconnaissance, le dédain, l’ironie, la cruauté, mais en parure, cachés sous des sourires et des