Aller au contenu

Page:Vaudere - Les Demi sexes.pdf/208

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
199
LES DEMI-SEXES

per et à tromper plus longtemps les autres.

Elle constatait avec étonnement que tous les baisers l’importunaient, bien qu’elle n’y fût point tout à fait insensible. Elle n’avait jamais senti, comme tant d’autres femmes, sa chair émue par l’attente troublante et désirée des étreintes. Elle les subissait, les acceptait, conquise et vibrante malgré elle, mais jamais entraînée.

Est-ce que son corps, si fin, si délicat, si raffiné gardait des pudeurs inconnues, des pudeurs d’animal supérieur et aristocratique ignorées de son esprit sceptique ?…

La voiture s’arrêta rue du Regard, devant une ancienne et haute maison. Camille descendit avec miss Ketty. C’était là, au fond de la cour, dans un jardinet broussailleux planté de quelques beaux arbres. L’atelier, très spacieux, formait un pavillon carré avec deux perrons élevés de plusieurs marches. Camille frappa à la porte, et le sculpteur vint ouvrir, sans reconnaître, d’abord, la visiteuse.

Elle se nomma, et comme il demeurait sur pris et déconcerté :

— C’est l’artiste seul que je viens voir, dit-elle en souriant ; ma démarche est intéressée…

— Entrez et soyez indulgente, mademoiselle.