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Page:Vaudere - Les Demi sexes.pdf/224

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LES DEMI-SEXES

chait d’autant plus qu’on semblait la dédaigner davantage. Elle avait pour Georges ses plus gracieux sourires, sa voix la plus caressante…

Lui, devait toujours ignorer les façons de l’amour moderne, ses audaces et ses dédains à peine dissimulés. Le nouvel art d’aimer consomme énormément de paradoxes, de moqueries, de mensonges et de poses. La passion est un martyre, on n’en veut plus ! On ne fait même plus semblant d’aspirer à l’idéal, à l’infini, à la perfection ; on s’amuse en s’égratignant gentiment comme des félins sur une gouttière. Les belles phrases, jadis, étaient un prétexte à mettre encore plus d’ardeur dans la pratique, plus de rage dans les chutes… Maintenant, on tombe mollement, sans conviction et sans désirs réels ; on tombe souvent et les blessures n’ont pas de gravité.

Camille avait dressé ses batteries en croyant deviner le caractère de Georges. La comédie du sentiment pouvant avoir pour ce sauvage le charme de la nouveauté, elle se fit rêveuse, douce, innocente, avec des confidences de petite fille.

Miss Ketty, droite et muette dans un coin de l’atelier, n’en revenait pas. Elle avait assisté à tant de folles escapades qu’elle ne pouvait