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Page:Vaudere - Les Demi sexes.pdf/311

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LES DEMI-SEXES

comme nous ont un cœur ?… Tu as joué au mariage, voilà tout… Tu voulais un mari, un vrai, parce que tu ne connaissais pas encore cette sensation-là… Maintenant, la comédie a assez duré… tu deviendrais ridicule !

— Oui.

— Tu pleures ?… Allons, pleure un peu, cela te fera du bien… Et puis, tu es si jolie quand tu pleures… Tes lèvres !…

Elle lui prit les mains, essaya de l’entraîner. Camille avait un léger peignoir de mousseline de soie et de dentelle ; elle serra son amie, agrafa sa bouche dans un baiser violent comme une morsure, et, reculant insensiblement, fit sauter le bas de sa robe dans le foyer. En une minute elles furent environnées de flammes. Nina voulut crier ; mais, emprisonnée dans les bras de Camille, avec, sur ses lèvres, le bâillon vivant de sa bouche, elle ne trouva que les sons étranglés du râle dans sa poitrine, dont chaque aspiration, creusée plus avant, semblait partir de ses entrailles.

Quand les secours arrivèrent, il était trop tard. On retrouva les corps des deux femmes enlacés, sans vêtements, les chairs entièrement calcinées. Sous l’action du feu, leurs cadavres s’étaient si étrangement amoindris et tordus