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Page:Vaudere - Les Demi sexes.pdf/71

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LES DEMI-SEXES

— Aurais-tu peur de venir chez moi ?… C’est mon appartement de garçon que je ne montre qu’aux initiés.

Camille allait prendre l’escalier. Elle la retint par le bras.

— C’est ici, au rez-de-chaussée… Quelquefois je reçois des amies… Tu verras, nous nous amuserons bien !

En effet, d’autres femmes étaient venues les jours suivants : de toutes jeunes fillettes même qui faisaient attendre leurs gouvernantes dans l’antichambre.

Sur la porte, une plaque gravée portait : « Madame Berton, professeur de dessin. » On ne voyait là que des femmes, et nul n’y trouvait à redire dans le quartier. Toutes ces écolières aux tailles encore grêles, aux tempes fraîches, aux visages délicats, se regardaient avec l’imperturbable assurance de leurs yeux purs sans trouble et sans révolte. Elles semblaient ignorer le mal, ignorer l’amour, et venir d’une église où elles auraient prié les anges pour la rémission des péchés des autres.

À Paris, seulement, se rencontrent ces jolies créatures au visage candide qui cachent sous les apparences de la plus virginale chasteté la dépravation d’une courtisane antique.