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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/248

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— 1814 —

est arrêté à la Ferté-sous-Jouarre. On ne pouvait donner à Napoléon une meilleure nouvelle. Enfin, il allait donc prendre corps à corps cet adversaire insaisissable ! Les troupes, exaltées par la promesse d’une bataille pour le soir même, franchissent, pour ainsi dire, au pas de course, les quelques lieues qui séparent les deux Ferté ; elles arrivent. Vain espoir ! efforts perdus ! Du haut des collines qui dominent la Ferté-sous-Jouarre et la rive gauche de la Marne, nos soldats aperçoivent, sur la rive droite, Blücher et son armée qui se disposent à la retraite. Les joindre est impossible : tous les ponts sont coupés. La nuit entière, toute la journée du lendemain, sont employées à rétablir les passages. Malgré l’avance que cette opération donne aux Prussiens, Napoléon espère les atteindre avant qu’ils aient encore pu mettre le cours de l’Aisne entre eux et lui. Ils ne se retirent pas, d’ailleurs, ils fuient dans un désordre qui ralentit leur marche, et par des chemins de traverse qu’un dégel subit vient de transformer en une boue liquide où les équipages et l’artillerie enfoncent jusqu’à l’essieu.

Le 2 mars au soir, les ponts sur la Marne se trouvant enfin rétablis, l’armée impériale n’attendit pas le jour pour passer sur la rive droite. Mais, au lieu de marcher derrière l’ennemi, elle remonta la grande route pavée de Paris à Châlons jusqu’à Château-Thierry, et là, tournant à gauche, elle se dirigea sur Fère-en-Tardenois et Fismes, où elle arriva le 4 au matin. Ce mouvement plaçait l’Empereur entre Soissons et Reims, et le rendait maître de tous les chemins entre ces deux villes.

La position de Blücher était critique. Non-seulement ses régiments harassés se débandaient, laissant à chaque pas des blessés, des traînards, des bagages ; mais, pressé sur sa droite par Napoléon ; menacé sur sa gauche par les deux corps de Marmont et de Trévise, qui, sur les ordres de l’Empereur, venaient de reprendre l’offensive et de déboucher par Neuilly-Saint-Front et Villers-Cotterets ; arrêté en tête par l’Aisne,