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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/255

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— 1814 —

taque ou de retraite devait être ajournée jusqu’après cette concentration. Ce plan n’appartenait pas tout entier au Tzar : les instances et les promesses d’un royaliste arrivé de Paris, et dont nous dirons plus loin la démarche, avaient surtout décidé l’empereur Alexandre : on adopta l’avis de ce souverain. Plusieurs officiers portèrent immédiatement à Blücher l’ordre de concentrer toutes ses colonnes à Châlons, et Schwartzenberg, à la tête de toutes ses forces, se mit lui-même en marche pour gagner cette ville. Comme on l’a vu, la route qui devait l’y conduire traversait Arcis, et c’étaient ses têtes de colonnes qui se présentaient sous les murs de cette cité, par la rive gauche de l’Aube, quand Napoléon, convaincu que le quartier général des souverains s’était replié à plus de vingt lieues de là, remontait la rive droite.

Cette rencontre inattendue, nouveau et fatal résultat de la terreur qu’il inspirait, devint une des plus rudes batailles de cette courte campagne.

L’Empereur, à la vue des masses qui se déployaient de l’autre côté de l’Aube, à la persistance et à la force des décharges de leur artillerie, reconnut la présence de toute l’armée de Schwartzenberg. Il ne voulut pas reculer. Traversant au galop le pont et la ville, il arriva sur le champ de bataille au moment où les régiments alors engagés commençaient à plier sous les coups d’une batterie de 60 pièces et sous l’effort d’un ennemi huit fois plus nombreux. Sa présence rétablit le combat. À Montereau, lui-même avait pointé les canons de sa garde ; cette fois, il mit l’épée à la main et lutta de sa personne. Enveloppé à différentes reprises dans le tourbillon des charges de cavalerie, il ne dut son salut qu’à son propre courage et au dévouement des officiers placés à ses côtés. Enfin, la garde arrive et forme ses lignes. L’ennemi redouble son feu. Un obus tombe à quelques pas de l’Empereur et vient rouler le long d’un des carrés placés devant lui. Le sentiment de conservation agit instinctivement sur ces hommes d’élite ;