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— 1814 —

manifestation de Bordeaux.) — Leur retour est une éventualité irréalisable. » Tout autre que M. de Vitrolles se serait tenu pour battu après une telle déclaration ; mais, loin de céder, il insista avec tant de chaleur sur l’opportunité du rappel des anciens princes, dont le rétablissement, disait-il, importait au repos de l’Europe autant qu’à l’intérêt de la France ; la conviction qui l’inspirait était si forte, qu’il finit par ébranler Alexandre. S’il ne gagna pas immédiatement le Tzar à la cause des Bourbons, il réussit du moins à le détacher du nombre de leurs adversaires. C’était déjà un succès ; il devait en obtenir un autre plus important.

« Votre Majesté ne connaît de la France que quelques départements, ajouta M. de Vitrolles : or ce n’est pas dans les provinces que les partisans des Bourbons peuvent donner la mesure de leurs forces ; c’est à Paris, centre de l’opinion royaliste, foyer de toutes les résistances au gouvernement de Napoléon. Le jour où les troupes alliées paraîtront sous les murs de la capitale, les nombreux royalistes qu’elle renferme ne craindront pas de se montrer, et le mouvement contre Napoléon éclatera, général, irrésistible. — En êtes-vous bien sûr ? — J’en réponds sur ma tête. — Mais ce mouvement, qui le dirigera ? » Entraîné par sa situation même à s’exagérer la signification réelle de l’adoption du rapport de la commission des Cinq, et de l’opposition persistante des quatre ou cinq Sénateurs qui avaient voté contre l’établissement de l’Empire, M. de Vitrolles n’hésita pas à promettre le concours de la majorité du Corps législatif et d’une partie du Sénat. Parmi les hauts fonctionnaires de l’Empire décidés à se prononcer dans le même sens, il cita, à tout hasard, les noms de MM. de Talleyrand, de Dalberg, de l’abbé de Pradt et du baron Louis. « Je crois, comme vous, dit le Tzar après quelques instants de silence, que c’est à Paris seulement que la question entre Napoléon et nous doit se décider. Je l’ai toujours pensé, je l’ai dit cent fois ! Je suis las, d’ailleurs, de cette lutte sans résultats où nous n’avan-