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— 1814 —

dans toutes les directions par une cavalerie formidable plus nombreuse à elle seule que ne l’étaient leurs deux corps réunis, chargés par des masses d’infanterie, accablés de boulets et de mitraille, Marmont et Mortier se battirent avec un véritable acharnement ; la résistance de leurs soldats était désespérée : cependant elle aurait été vaincue, et la lutte inégale soutenue par les deux maréchaux aurait amené l’entière destruction de leurs colonnes, si un de ces incidents qui se renouvelèrent souvent dans cette courte et rude campagne, n’était pas venu affaiblir progressivement, puis suspendre les attaques furieuses qu’ils s’efforçaient de repousser.

Deux divisions de gardes nationaux mobilisés, commandées par les généraux Pacthod et Amey, conduisaient de Meaux et de Sézanne, à l’Empereur, un convoi assez considérable d’artillerie. Arrêtés près du village de Morin par les premiers détachements alliés, ces deux généraux se replièrent. Bientôt de fortes décharges, venant de leur droite, les avertirent du voisinage d’un corps de troupes françaises. Ces troupes étaient celles de Marmont et de Mortier. Pacthod et Amey s’avancèrent dans la direction du canon ; mais, au lieu de donner dans les régiments des deux maréchaux, ce fut au milieu des réserves de l’armée russe qu’ils tombèrent. L’effort de l’ennemi se tourna immédiatement contre eux. Les héroïques paysans qui composaient ces deux divisions, arrachés la veille à leur famille, étaient à peine exercés : ils se forment sur-le-champ en carrés par régiment, et se disposent à la résistance la plus désespérée. La plaine qu’ils sont obligés de traverser est sans bois, sans mamelons, sans le moindre accident de terrain. Assaillis dans leur marche par un ennemi dont le nombre grossit à chaque pas, ils parviennent cependant à atteindre le pied des collines de Fère-Champenoise sans que leurs rangs aient faibli une seule fois, sans qu’une seule charge les ait entamés. Mais là, entourés par les quatre corps des généraux Palhen. Wassiltchikoff,