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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/310

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— 1814 —

l’Empereur qui arrive ; la proclamation l’annonce. » La venue de l’Empereur, mensonge excusable sans doute, devenait immédiatement le texte de toutes les conversations ; on voyait déjà l’ennemi battu, chassé loin de Paris, et, pour quelques instants, l’inquiétude se calmait.

Joseph, pendant ce temps, s’installait aux Tuileries ; le ministre de la guerre Clarke restait enfermé dans ses bureaux ; et le général Hullin, commandant la place et la division militaire de Paris, se bornait à faire prendre note, au pont de Charenton, du nombre de soldats ramenés par Mortier et Marmont, et à diriger sur les barrières les plus menacées quelques canons, ainsi que des détachements empruntés soit aux conscrits, soit aux soldats de dépôt ou même aux convalescents composant la garnison.

Jusqu’au 29, Joseph avait eu le titre de lieutenant général de l’Empire sans en exercer sérieusement les fonctions : c’était l’Empereur qui continuait à gouverner à l’aide de décisions transmises de ses différents quartiers généraux. Les affaires courantes s’expédiaient par l’impératrice-régente, assistée de Cambacérès et des ministres à département. Quant au lieutenant général, la plupart de ses journées s’écoulaient au Luxembourg, au milieu d’un petit nombre de courtisans dont les grosses flatteries lui faisaient prendre tellement au sérieux sa royauté d’Espagne et des Indes, que, sollicité par Napoléon, peu de temps auparavant, d’abdiquer en faveur de Ferdinand VII, il avait longtemps repoussé cette demande. Vainement l’Empereur lui faisait observer qu’un traité était déjà signé avec Ferdinand, qu’il ne perdait ni n’abandonnait rien, puisque, depuis plus de dix mois, il était sans sujets et sans royaume ; Joseph ne céda qu’après une résistance opiniâtre. « En vérité, disait l’Empereur à cette occasion, ne dirait-on pas que je lui enlève sa part dans l’héritage du feu roi, notre père[1] ? » Créé roi deux fois par Napoléon, Joseph avait perdu,

  1. Le prince Louis, nature infirme, organisation maladive, avait également