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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/347

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— 1814 —

s’était successivement élevé ; les mots que nous venons de rapporter furent prononcés avec une certaine énergie. La conversation ne tarda pas à devenir plus générale ; il adressa plusieurs questions à différents membres de la députation, et demanda à M. Barthélémy, entre autres, « où était M. de Talleyrand, et si l’on connaissait ses dispositions. » M. Barthélemy ne put répondre. On se sépara.

Connaître les dispositions de M. de Talleyrand était difficile. Lui-même n’aurait su les dire. Incertain des événements, ne connaissant rien des projets des Alliés ni de la position exacte de l’Empereur, il n’avait aucune résolution arrêtée ; il attendait. Comme grand officier de la couronne, M. de Talleyrand avait reçu l’ordre de rejoindre Marie-Louise à Blois. Le 29, il avait fait ses préparatifs de départ, et, le 30 au matin, il se disposait à monter en voiture quand le bruit du canon des buttes Chaumont et de Belleville vint soudainement l’arrêter. La bataille finie et l’armistice signé, sa perplexité augmenta. La reddition de Paris, événement nouveau, inattendu, pouvait décider du résultat de la campagne et du sort de l’Empereur. « Il ne convenait pas à tout le monde de se laisser ensevelir sous les ruines de l’édifice, » avait-il dit, au sortir du conseil de régence où fut décidé le départ de l’Impératrice ; et il était de ceux qui voulaient échapper. Résolu à voir venir le lendemain, sans cependant se compromettre avec le gouvernement impérial, il se rendit chez le duc de Rovigo, ministre de la police : « Je ne refuse pas de partir, lui dit-il, mais il me semble préférable, dans l’intérêt de l’Empereur et de tout le monde, de rester. Je désire, pour le bien de tous, que l’édifice ne soit pas détruit, et ce n’est plus qu’à Paris qu’on peut le sauver. — Et il recommença ses tirades contre ceux qu’il accusait de tous les malheurs qui arrivaient, a ajouté Savary ; il plaignait vivement l’Empereur de s’en être rapporté aux ignorants qui l’avaient perdu[1]. Le ministre de

  1. Mémoires de Savary, duc de Rovigo, t. VII.