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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/35

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— 1793 - 1799 —

les désordres publics et privés. Les royalistes, désireux d’activer la décomposition du gouvernement républicain, ajoutaient encore au désordre en portant, sous prétexte de guerre civile, le meurtre et l’incendie sur tous les points du territoire. Chaque jour on apprenait l’arrestation de plusieurs voitures publiques, le pillage d’un bourg, l’embrasement de quelque ferme ou l’assassinat de citoyens dévoués à la Révolution. Les impôts ne rentraient qu’avec peine. Un grand nombre de receveurs, victimes ou complices de bandits de bonne maison, soldaient leurs comptes avec des procès-verbaux d’effraction. Toutes les caisses étaient vides. Nos armées elles-mêmes n’échappaient pas au découragement général : confiées à des chefs que le gouvernement laissait sans direction ou à des généraux incapables ; attaquées, comme nous l’avons dit, en Italie, sur le Rhin et en Hollande, elles faiblissaient sur tous les points.

Barras, au milieu même des débauches qui remplissaient sa vie, entrevoyait l’avenir que la corruption de son administration, la faiblesse ou la nullité de ses collègues, préparaient au gouvernement directorial. Déjà il sentait le pouvoir échapper à leurs mains. Trop faible et trop décrié pour arrêter le mouvement, il se crut du moins capable de le conduire, et consentit à le diriger en faveur de Louis XVIII. La contradiction entre ses actes en fructidor et ce nouveau but n’était qu’apparente : en 1797, il avait défendu sa position ; en 1799, il voulait assurer sa fortune ; les circonstances avaient changé ; le mobile était resté le même.

Les premières négociations entre Barras et la cour de Mittau eurent lieu vers le mois d’avril 1799, par l’entremise du marquis de la Maisonfort, type assez curieux des émigrés politiques de cette époque. M. de la Maisonfort avait la prétention de « marcher avec son siècle. » Voici les principaux passages de la lettre qu’il écrivit à Louis XVIII en lui proposant le concours de Barras :