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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/373

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— 1814 —

avait été vivement impressionné par les cris de Vive le roi ! vivent les Bourbons ! que proféraient les royalistes marchant en tête du cortége des souverains alliés. Cet homme, dont le nom fut voué depuis à une triste célébrité, était l’avocat Bellart. Il courut, dans la soirée, chez plusieurs de ses collègues, et, les entraînant par la chaleur de sa parole et par la passion qui venait subitement de l’illuminer, il convint avec eux d’une réunion qui, en effet, eut lieu le lendemain, à l’Hôtel de Ville. Treize membres seulement sur vingt-quatre se trouvèrent présents. M. Bellart leur proposa de publier une proclamation au peuple de Paris et une déclaration où le Conseil demanderait la déchéance de Napoléon, ainsi que le rappel des Bourbons. Une démarche aussi éclatante effraya les conseillers. On décida d’en référer au préfet de la Seine et à M. de Talleyrand. Le préfet, alors M. de Chabrol, répondit qu’il ne s’opposait point à cette manifestation ; mais, attaché à l’Empereur, disait-il, par ses serments et par la reconnaissance, il ne pouvait prêter au Conseil qu’un concours purement moral. M. de Chabrol craignait de s’engager ; il ignorait à qui appartiendrait le lendemain. M. de Talleyrand fut plus net : il accueillit fort mal la confidence et qualifia le projet du Conseil d’excès de zèle. M. Bellart ne fut pas ébranlé ; sa proclamation était faite ; il tenait à la publier ; ses collègues, sans force contre sa volonté enthousiaste, le laissèrent aller, et, le soir du 1er avril, les passants purent lire, affichée sur les murs de Paris, la pièce suivante :

« Habitants de Paris, vos magistrats seraient traîtres envers vous et la patrie, si, par de viles considérations personnelles, ils comprimaient plus longtemps la voix de leur conscience.

Elle leur crie que vous devez tous les maux qui vous accablent à un seul homme.

C’est lui qui, chaque année, par la conscription, décime nos familles. Qui de nous n’a perdu un fils, un frère, des parents, des amis ? Pour qui tous ces braves sont-ils morts ? Pour lui seul, et non pour le pays. Pour quelle cause ? Ils ont été immolés, uniquement immolés à la dé-