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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/438

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— 1814 —

de Saint-Raphau, au même lieu où, quinze ans auparavant, à son retour d’Égypte, il avait débarqué pour aller saisir le pouvoir dont l’Europe victorieuse venait de le déposséder. Éternel résultat de passions sans mesure, d’une puissance sans limites, et leçon toujours perdue ! Lorsque, le 22 juin 1812, Napoléon avait franchi le Niémen pour aller porter la guerre jusqu’aux extrémités du continent européen, son front était ceint d’une double couronne : Empereur, ses États s’étendaient des bouches de l’Elbe aux bouches du Tibre ; la Hollande était française ; la capitale du Monde catholique, Rome, était devenue le simple chef-lieu d’un département français ; Roi d’Italie, il ne régnait pas seulement sur la Lombardie et les anciens États vénitiens ; une de ses sœurs occupait le trône de Naples, et il avait, en outre, assis deux de ses frères sur les trônes d’Espagne et de Westphalie ; Protecteur de la Confédération Helvétique, et Médiateur de la Confédération du Rhin, ses ordres étaient des lois pour la Suisse, pour la moitié de l’Allemagne, et leurs soldats n’avaient pas d’autre drapeau que le sien ; enfin, il entraînait à sa suite, contre la Russie, les armées de l’Autriche et les armées de la Prusse. Vingt-deux mois seulement s’étaient écoulés et tous ces trônes, si péniblement élevés, se trouvaient abattus ; toutes les provinces qu’il avait conquises ou absorbées étaient perdues ; sa double couronne était brisée ; et de toute cette fortune prodigieuse, de tous ces vastes États, de tous ces immenses domaines, il ne lui restait plus que l’imperceptible îlot qu’il tenait de la pitié de ses ennemis, et vers lequel alors cinglait son navire.


FIN DU TOME PREMIER.