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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/88

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— 1800 - 1807 —

Un déplorable événement, qui précéda de quelques jours le suicide de ce général, prouve qu’en effet Bonaparte n’avait pas besoin de la complicité des ténèbres pour les coups qu’il voulait porter. Il lui suffisait de faire un signe : ses ordres, quelque terribles qu’ils fussent, trouvaient immédiatement des tribunaux et des juges qui s’empressaient de les exécuter.

L’instruction du procès Cadoudal durait déjà depuis plusieurs semaines, et les juges, malgré leur zèle, ne pouvaient éclaircir un point que Georges s’obstinait à laisser dans l’obscurité. « Un des ci-devant princes français, avait-il dit dans son interrogatoire, devait arriver à Paris. » Quel était ce prince ? Était-il venu ? Georges refusait de répondre à ces questions. Ses coaccusés, interrogés sur les mêmes faits, se montraient tous d’accord sur l’attente où ils étaient de l’arrivée d’un des membres de l’ancienne famille royale ; plusieurs ajoutaient qu’il devait avoir assisté à quelques-unes des conférences tenues entre leurs chefs, mais aucun d’eux ne l’avait positivement vu ni ne pouvait dire son nom. Chaque jour ces déclarations étaient transmises à Bonaparte, en même temps qu’une foule de bruits recueillis par la police sur de nouvelles tentatives ourdies contre sa personne par d’autres chouans demeurés cachés dans Paris, où ils épiaient, disait-on, l’occasion d’accomplir l’assassinat que Georges n’avait pu consommer. Toutes ces nouvelles l’irritaient, l’exaspéraient : « En 1800, s’écriait-il, on a voulu me faire sauter au moyen d’un baril de poudre ; aujourd’hui on veut m’égorger sur une grande route. Je suis incessamment menacé de machines infernales, de fusils à vent, de complots, d’embûches de toute espèce. Les Bourbons croient-ils donc qu’on peut verser mon sang comme celui des plus vils animaux ? Mon sang, pourtant, vaut bien le leur ! Jamais je n’ai personnellement rien fait aucun d’eux ; je leur rendrai la terreur qu’ils veulent m’inspirer ; je ferai impitoyablement fusiller le premier d’en-