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Page:Verhaeren - Poèmes, t3.djvu/19

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les villages illusoires


Fixaient, obstinément,
Cet homme fou, en son entêtement
À prolonger son fol voyage.

Celle là-bas qui le hélait,
Dans les brumes, hurlait, hurlait,
La tête effrayamment tendue
Vers l’inconnu de l’étendue.

Le passeur d’eau, comme quelqu’un d’airain,
Planté, dans la tempête blême,
Avec l’unique rame, entre ses mains,
Battait les flots, mordait les flots quand même.
Ses vieux regards hallucinés
Voyaient les loins illuminés
D’où lui venait toujours la voix
Lamentable, sous les cieux froids.

La rame dernière cassa
Que le courant chassa
Comme une paille, vers la mer.