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Page:Verhaeren - Poèmes, t3.djvu/80

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poèmes, iiie série

Les chanvres clairs tendent leurs chaînes
Continuement, durant des jours et des semaines.

Avec ses pauvres doigts qui sont prestes encor,
Ayant crainte parfois de casser le peu d’or
Que mêle à son travail la glissante lumière,
Au long des clos et des maisons,
Le blanc cordier visionnaire,
Du fond du soir tourbillonnaire,
Attire à lui les horizons.

Les horizons ? ils sont là-bas :
Regrets, fureurs, haines, combats,
Pleurs de terreurs, sanglots de voix,
Les horizons des autrefois,
Sereins ou convulsés :
Tels les gestes dans le passé.

Jadis — c’était la vie errante et somnambule,
À travers les matins et les soirs fabuleux,
Quand la droite de Dieu, vers les Chanaans bleus,
Traçait la route en or, au fond des crépuscules.