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les villages illusoires


Voici — c’est un palais de lasse architecture
Ployé sous les cent ans dont il soutient le poids,
Et d’où sortent, avec terreur, de larges voix
Invoquant le tonnerre en vol vers l’aventure.

Sur la route muette et régulière,
Les yeux fixés vers la lumière
Qui frôle, en se couchant, les clos et les maisons,
Le blanc cordier visionnaire,
Du fond du soir tourbillonnaire,
Attire à lui les horizons.

Les horizons ? — ils sont là-bas :
Lueurs, éveils, espoirs, combats,
Les horizons qu’il voit se définir,
En espérances d’avenir,
Par au delà des plages,
Que dessinent les soirs, dans les nuages.

Là-haut — parmi les loins sereins et harmoniques,
Un double escalier d’or suspend ses degrés bleus,
Le rêve et le savoir le gravissent tous deux,
Séparément partis vers un palier unique.