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des éléphants vêtus de housses, des bœufs de Nagare, des fakirs et de noirs cavaliers aux blanches draperies, escortant au travers de la foule


Le palankin doré des Radjahs indolents.


Mais Djihan-Guîr reste morne, oublieux de son peuple innombrable. Il n’aime plus l’éclair de la lance, ni sa cavale à l’œil bleu qui se cabre au cliquetis des cymbales, ni le rire harmonieux des femmes, ni les perles de Lanka qui chargent son front lassé. Le Roi du monde est triste, un désir le blesse.

Avant d’aller plus loin, ai-je besoin de faire remarquer comme dans ce tableau, dont je donne un sec résumé, revit le décor opulent où s’est déroulée l’histoire de Nurmahal et avec quel sens de la composition il est incorporé au récit ? Ai-je besoin d’ajouter que ce début de poème est heureusement imité du début de Zim-Zizimi ?

Cependant la nuit tombe, les constellations se lèvent, le fleuve réfléchit dans ses eaux


La pagode aux toits lourds et les minarets longs.


Mais voici qu’une voix, jeune, éclatante et pure, remplit l’air nocturne. Djihan-Guîr écoute ; son cœur bat et son œil luit : il sent un frisson d’aise courir en lui, comme le tigre qui flaire l’antilope. Jamais pareille ivresse n’a inondé son cœur. Qui donc chante ainsi ? C’est la blanche Nurmahal. Son époux Ali-Khân est parti, la guerre le réclamait ; mais le nom du Prophète incrusté sur sa lame garantit la fidélité de Nurmahal : elle lui a juré dans leurs adieux