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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/173

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Wäinämöinen reposait dans le sein de sa mère depuis trente années, et le temps lui paraissait long. Il supplia le soleil, la lune et les brillantes otawas (les étoiles de la grande ourse) de venir le délivrer. Mais les astres demeurèrent sourds à sa voix. Alors il ouvrit lui-même la porte de sa prison. Il vit avec bonheur l’éclat de la lune, du soleil et des otawas ; il se réjouit de respirer le souffle de l’air. Puis il se forgea un cheval léger comme la paille, et il se mettait à chevaucher sur la terre frémissante, quand un vieux Lapon animé contre lui d’une haine implacable blessa son cheval et le précipita dans les flots. Pendant qu’il se promenait sur les flots, Wäinämöinen créa la terre par une série de gestes :


Partout où il élève sa tête, il crée une île ; partout où il tourne la main, il crée un promontoire ; partout où son pied touche le sable, il creuse des tombes aux poissons. Quand il approche de la terre, il y enchante les filets des pêcheurs ; quand sa course le plonge dans l’abîme, il y fait surgir des rochers, il y enfante des écueils où se brisent les navires, où les marchands trouvent la mort[1].


À ce moment apparut un aigle, et le dieu lui offrit un asile sur son genou. Là, l’oiseau bâtit un nid, pondit et couva un œuf, et Wäinämöinen, ayant jeté l’œuf dans l’abîme, dit : « Que la partie inférieure de l’œuf soit la terre ; que la partie supérieure soit le ciel ; que tout ce qu’il renferme de blanc soit la splendeur du soleil, que


  1. Léouzon Le Duc, t. I, p. 7.