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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/247

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Cependant le Hadjeb ou ministre de l’Empire, après s’être prosterné trois fois et après avoir salué le maître de tous les titres adulateurs dont les vils héritiers de l’humble Aly ne rougissent pas de se laisser décorer, introduit un homme, un vieillard. La tête et les pieds nus, les deux mains liées, maigre comme un vieil aigle, il s’avance, la narine gonflée par le dédain, bravant l’envie, hautain sous l’affront : c’est


Mouça-ben-Noçayr, l’Ouali du Maghreb.


Et le Hadjeb commence à l’accuser. — Cet homme, dit-il, sans attendre l’ordre du maître, a passé la mer et combattu les Goths. Il s’est gorgé du sang et de l’or des infidèles. Il a voulu, dans l’ivresse de son orgueil, rompre l’unité de l’Empire, séparer l’Orient du Couchant ; il a rêvé de s’élever jusqu’au faîte où l’on contemple le Khalyfe. Et qui sait si en son cœur il ne reniait pas Dieu pour le fils de la Vierge, puisque son fils, Abd-al-Azys, a osé prendre pour femme


La veuve du roi goth qui mourut à Xérès ?


(Aucun texte n’autorisait formellement Leconte de Lisle à supposer que Mouça eut à se justifier devant le khalyfe d’accusations semblables. Mais le poète n’en reste pas moins ici dans les limites de la vraisemblance. Car ce fut bien dans la crainte de voir les fils de Mouça rompre l’unité de l’Empire, — et elle n’allait pas tarder à être rompue, — que Soulymân les fit massacrer ; et pour perdre Abdelaziz on invoqua bien contre lui son mariage