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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/271

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dans la romance Sur la mort de don Frédéric, le récit est fait, en partie par le héros, en partie par le poète.

Avec trois cents de ses Mores, le roi de Grenade quitta l’Alhambra. Il emportait ses joyaux pour les donner à don Pèdre.

Présenté au roi, il lui dit : « Dieu te garde, ô roi ! et qu’il augmente ta couronne et ta renommée ! Je me mets en ta main. Qu’elle me daigne secourir. Car mon frère Mahomet est entré dans Grenade. Si tu viens à mon secours, ô roi ! je m’engage à te payer constamment un tribut. » Le roi don Pèdre répondit : « Soyez le bienvenu, roi ! Reposez-vous en ma maison ; l’aide qu’on pourra vous accorder, on ne vous la refusera jamais. » Et le prince more reçut un bon logis.

Mais, tandis qu’il soupait, des gens armés se saisirent de lui et de ses chevaliers, et leur enlevèrent leurs joyaux.

À deux jours de là, on le transporta dans un champ. Le roi don Pèdre était là avec sa lance. Il fit aussitôt mettre en pièces trente-sept Mores de bonne famille. Puis, arrivé près du roi, il lui donna un mortel coup de lance, en lui disant : « Prends, déloyal ; car jamais je n’oublierai qu’à cause de toi j’ai fait avec le roi d’Aragon un mauvais accord, par suite duquel j’ai perdu le château d’Ariza et le pays d’alentour. »

Le roi more lui répondit en sa langue : « Roi don Pèdre ! roi don Pèdre ! tu as fait là une chevauchée dont tu ne retireras pas beaucoup d’honneur. »