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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/273

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Quand un clerc l’arrête, en saisissant le mors de sa mule, nous sommes entrés sous une poterne basse à voussure de brique. Et dans quelle belle salle à manger nous pénétrons à la suite de don Pèdre !


La salle est haute, étroite et fraîche, à demi-close
De gaze diaphane et d’un treillis léger ;
Et, de l’aurore au soir, la fleur de l’oranger
Y mêle son arôme à celui de la rose.

La terrasse mauresque, aux trèfles ajourés,
Domine les jasmins et les caroubiers sombres
Qui jettent, çà et là, de lumineuses ombres
Où palpitent des vols de papillons pourprés.


Les événements, qui ont pour témoins de plus pittoresques décors, s’y accomplissent avec plus d’horreur. Plus de conversation entre le roi et son frère. Fadrique est encore dans la cour, quand Pèdre jette son ordre cruel du haut d’un balcon :


À la male heure êtes venu vous mettre
Entre mes mains, Bâtard ! Lopez, tuez le Maître !


L’autre lève sa masse. Mais Fadrique, pour plus d’effet, n’est pas assommé du coup. Il veut dégainer sa lame ; la masse se relève, retombe, et alors elle rompt la nuque, écrase le cerveau, fait écumer le sang noir.

Le poète, ayant assommé le grand-maître au lieu de le décapiter, égorge la reine au lieu de l’assommer. Et avec quelle férocité ! Don Pèdre exige qu’on cèle cette tuerie : il ne veut ni lutte, ni cris, ni vestige sanglant ; que la