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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/29

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Leconte de Lisle n’a-t-il pas raison, et peut-on résumer d’un mot plus juste l’épopée de Valmiki ? N’est-elle pas le poème de toutes les nobles affections ? N’est-elle pas aussi le poème de l’honneur ? Pour obéir à ce que réclame la voix de leur conscience, pour qu’une promesse même imprudente n’ait pas été faite en vain, un père chasse son fils, un prince renonce au pouvoir, une princesse se condamne à vivre dans la misère, des êtres qui s’aiment se séparent, sans qu’aucun d’eux, sauf le vieillard dans un moment de défaillance, admette qu’il puisse être question de se soustraire à la pénible, mais impérieuse, loi morale. Tendres comme les personnages de Racine, les héros du Ramayana ont le même culte du devoir que les personnages de Corneille.

Leconte de Lisle a-t-il respecté leur physionomie dans l’Arc de Civa ? On peut se le demander.


Le vieux roi Daçaratha, nous conte-t-il, pleure depuis trois jours entiers et depuis trois longues nuits. À la fin, il dit :


Qu’on appelle Rama, mon fils plein de courage !


Et il donne à son autre fils Laksmana l’ordre que dans le Ramayana il donne à son cocher :


Lève-toi, Lakçmana ! Attelle deux cavales
Au char de guerre, et prends ton arc et ton carquois.
Va ! Parcours les cités, les montagnes, les bois,
               Au bruit éclatant des cymbales.

Dis à Rama qu’il vienne. Il est mon fils aîné,
Le plus beau, le plus brave, et l’appui de ma race.