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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/50

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enflammer de tes feux. Ô Djâtavédas, dans le corps fortuné formé par toi, transporte-le au monde des (hommes) pieux.

Ô Agni, fais-le redescendre ensuite parmi les Pitris ; qu’il vienne au milieu des invocations et des offrandes. Revêtu de sa vie, qu’il prenne une dépouille (mortelle). Ô Djâtavédas, qu’il s’unisse à un corps.

[Le poète s’adresse de nouveau au mort :] Cependant qu’un noir oiseau, que la fourmi, que le serpent, ni la bête de proie ne touche point à ton (ancien) corps. Qu’Agni, que Sôma, qui a désaltéré les enfants des prêtres, te préservent de tous ces accidents}[1].


Ce sont là de fortes paroles, mais dont on ne peut saisir le sens qu’avec une grande attention, soit parce que l’ordre fait défaut, soit parce que le poète s’adresse tour à tour au mort et au dieu sans nommer celui qu’il interpelle, soit enfin parce que nous ne sommes pas faits à cette conception de deux corps, l’ancien, qui va se confondre avec les éléments, le nouveau, qui doit transporter l’âme.

En s’emparant de ce début d’hymne à Agni pour en faire la principale partie du sien, qui est aussi un hymne à Agni, Leconte de Lisle n’en a pas dissipé toute l’obscurité ; s’il y a mis plus d’ordre, il a peut-être accru la confusion que produit la multiplicité des apostrophes : car, chez lui, ce n’est plus seulement le dieu et le mort qui sont interpellés, c’est la libation, puis c’est l’âme ; tout à l’heure c’était la terre, plus loin ce sera Yama ; et pas une fois, quand il parle au mort, le poète ne nous en prévient ; et, quand il parle au dieu, pas une fois, avant la dernière strophe, il


  1. S. VII, 1. VI, h. XI, v. 1-6 ; Langlois, t. IV, p. 156.