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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/77

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maux, la Vie immense, la Vie auguste, palpite, rêve, étincelle, soupire et chante.

Donc, en face d’un somptueux décor, trois sages méditent, assis dans les roseaux. Vers le soir, ils interrompent leur mystique silence pour se raconter leur triste histoire.


Le Bhagavata-Purana se compose, nous l’avons dit, d’une série de conversations où des personnages divers racontent les efforts qu’eux-mêmes ou d’autres ont faits pour comprendre l’énigme du monde. Mais, tandis que tous les autres ont été amenés à chercher la solution du grand problème par une curiosité purement philosophique, un d’eux y a été poussé par un chagrin domestique, d’ailleurs vite oublié.

Il s’appelle Narada. L’esclave, sa mère, n’avait pas d’autre enfant que lui et il n’avait pas d’autre appui qu’elle. Une nuit qu’elle était sortie de la maison pour traire sa vache, son pied toucha dans le chemin un serpent envoyé par Kala (la mort). Mais ce fils fut prompt à se consoler, comme on va le voir par son récit :


Pour moi, regardant ce malheur comme un bienfait de l’Être suprême, qui désire le salut de ceux qui lui sont dévoués, je partis pour la région du nord. Après avoir traversé seul de fertiles contrées, des villes, des villages, des enclos pour le bétail, des mines, des hameaux de laboureurs, des bourgs, des vergers, des forêts et des bois, des montagnes riches en métaux variés, couvertes d’arbres dont les branches étaient brisées par les éléphants, des lacs dont l’eau donne le salut, des étangs fertiles en lotus…, je vis une forêt impénétrable, pleine de roseaux, de bambous, de cannes, de touffes d’herbes et de plantes à tiges