Page:Victor Baudot - Au Pays des Peaux-Rouges.djvu/200

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tourna et je la frappai en pleine poitrine. Elle courut sur moi : je tirai ma dernière cartouche et la blessai à la mâchoire : je sentis l’ours m’étreindre et je m’évanouis.

Revenu à moi, j’ouvris les yeux : mon cheval était près de moi, la tête baissée sur ma figure. L’ourse se tenait à côté du cheval, cherchant à le mordre à la croupe. Je me levai, saisis la bride du cheval et le tournai du côté opposé. Le museau de l’ourse était tout en sang ; elle me regardait et en soufflant me lança un flot de sang à la figure. J’étais complètement étourdi. L’ourse tourna derrière le cheval pour venir m’attaquer, je tirai la bride et tournai avec le cheval, et l’ourse saisissant mes vêtements avec ses pattes les déchirait. Je continuai ce manège, l’ourse me suivant toujours et cherchant à saisir mes habits, mais elle en était empêchée par les ruades de mon cheval. Mes habits, ma chemise étaient en lambeaux, et ma poitrine sillonnée de profondes blessures par les griffes de l’ourse. Voyez ces grandes cicatrices ! L’ourse s’efforçait de saisir le cheval par ses pieds de derrière ; mais celui-ci lui lançait des ruades en pleine poitrine. J’étais épuisé ; l’ourse s’éloigna à une trentaine de pas et s ; arrêta en me regardant. Je la surveillais, je voulais sauter en selle, mais je savais bien qu’aussitôt elle se précipiterait sur moi avec furie, et je tirai de son fourreau mon coutelas ; elle s’élança sur moi, et au moment où elle me mettait une patte sur l’épaule, je lui donnai un coup de couteau dans la gueule ; elle me mordit à la main : je sentis les os se rompre, je m’évanouis et restai sans connaissance je ne sais pendant combien de temps.

Lorsque je revins à moi, je me trouvai sous le ventre de mon cheval, et me traînant sur les mains et sur les genoux, je me relevai et je vis l’ourse debout derrière le cheval ; elle me regardait, balançant la tête à droite et