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Page:Victor Devogel - Légendes bruxelloises, 1903.pdf/87

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LÉGENDES BRUXELLOISES

le fer des ennemis, semant leurs os sur les chemins afin sans doute de faire reconnaître la route à ceux qui reviendraient.

Ils avaient prise alors cette ville, cause de tant de malheurs, oubliant leurs peines, leurs douleurs, leurs désastres, la choisissant comme capitale d'un nouveau royaume chrétien qu'ils croyaient avoir établi sur des bases solides : pauvre colosse, pas même de bronze, mais aux pieds d'argile et qui devait s'écrouler sous peu.

Et bien vite, la plupart de ceux qui avaient échappé à tant de maux prenaient le chemin du retour, avides de retrouver leurs proches et recommençant, à rebours, le long pèlerinage à travers toute l'Europe ; car ils comprenaient, les pauvres, que ceux qui étaient restés là-bas dans la patrie, se disaient chaque jour tout bas :

— Ah ! quand reviendront-ils ?

*
* *

Ceux qui attendaient étaient des femmes, des jeunes filles, des vieillards, des enfants dont le père, le fils, le fiancé étaient partis à la suite du seigneur. Peu d'hommes valides avaient refusé de s'enrôler sous la bannière à la croix rouge ; croyant lutter pour une cause sacrée, ignorant du reste les