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Page:Victor Devogel - Légendes bruxelloises, 1903.pdf/96

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LA CHASSE RÉCALCITRANTE


peuple, des petites gens des cités et des habitants des campagnes, tous ceux enfin que ne protégeaient point la crainte et le respect de la religion ? Ah ! qui dira jamais leurs tortures, à ceux-là ; qui décrira leurs souffrances, qui peindra leurs douleurs ; qui témoignera des maux endurés par ces pauvres, à peine considérés comme créatures humaines, plus mal traités que des bêtes ? Hélas ! nul ne l'écrira, car si les monastères et les nobles ont eu leurs historiens, le peuple n'en eut jamais et sa situation ne peut être établie que par comparaison.

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Parfois, l'anarchie prenait fin. Le silence semblait planer sur une partie du pays ; le calme renaissait dans les âmes ; la terre et les hommes paraissaient dans l'attente d'un événement prochain ou, celui-ci ayant eu lieu, il plongeait chacun dans un recueillement profond. Alors tous devenaient presque bons ; la religion réunissait les âmes qui communiaient dans une même pensée de charité et de paix ; seigneurs et esclaves s'agenouillaient devant le même autel, les uns près des autres ; tous courbaient la tête en même temps, se frappaient la poitrine, se prosternaient, fléchissaient les genoux, heurtaient du front la terre, s'humiliaient ensemble ;