Aller au contenu

Page:Vigny - Servitude et grandeur militaires, 1885.djvu/293

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et tendre à monter jusqu’au ciel. — C’est une vertu tout humaine que l’on peut croire née de la terre, sans palme céleste après la mort ; c’est la vertu de la vie.

Telle qu’elle est, son culte, interprété de manières diverses, est toujours incontesté. C’est une Religion mâle, sans symbole et sans images, sans dogme et sans cérémonies, dont les lois ne sont écrites nulle part ; — et comment se fait-il que tous les hommes aient le sentiment de sa sérieuse puissance ? Les hommes actuels, les hommes de l’heure où j’écris sont sceptiques et ironiques pour toute chose, hors pour elle. Chacun devient grave lorsque son nom est prononcé. — Ceci n’est point théorie, mais observation. — L’homme, au nom d’Honneur, sent remuer quelque chose en lui qui est comme une part de lui-même, et cette secousse réveille toutes les forces de son orgueil et de son énergie primitive. Une fermeté invincible le soutient contre tous et contre lui-même à cette pensée de veiller sur ce tabernacle pur, qui est dans sa poitrine comme un second cœur où siégerait un dieu. De là lui viennent des consolations intérieures d’autant plus belles qu’il en ignore la source et la raison véritables ; de là aussi des révélations soudaines du Vrai, du Beau, du Juste : de là une lumière qui va devant