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Page:Vigny - Stello ou Les diables bleus, 1832.djvu/214

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lui serrer cordialement. Le pauvre vieillard ! il en fut ému. Il se retourna et ajouta d’une voix douce (mais quoi de plus entêté que la douceur ?) : « Je suis bien peiné de vous avoir importuné de ma demande.

— Et moi, lui dis-je, de voir que vous ne voulez pas me comprendre, et que vous prenez un bon conseil pour une défaite. Vous y réfléchirez, j’espère. »

Il me salua profondément et sortit. Je revins me préparer à partir, en haussant les épaules. Un grand corps me ferma le passage de mon cabinet : c’était mon canonnier, c’était Blaireau, réveillé aussi bien qu’il était en lui. Vous croyez peut-être qu’il pensait à me servir ? — point ; à ouvrir les portes ? — pas le moins du monde ; à s’excuser ? — encore moins. Il avait ôté une manche de son habit de canonnier de Paris, et il s’amusait gravement à terminer, de la main droite, avec une aiguille, un dessin symbolique sur son bras gauche. Il se piquait jusqu’au sang, semait de la poudre dans les piqûres, l’enflammait, et se trouvait tatoué pour toujours. C’est