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Page:Villemain - Cours de littérature française, tome 1.djvu/11

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vivantes, bien que tout le reste soit renouvelé il y a, dans cette persistance, dans cette ténacité des anciennes formes, quelque chose qui empêche de voir toute l’originalité créatrice qui vient de naître avec la pensée chrétienne. Plus tard, au contraire, lorsque les vieilles races ont été balayées de la terre, ou du moins lorsqu’elles se sont cachées sous le costume des conquérants nouveaux, lorsqu’elles se sont dénaturées pour obtenir la permission de vivre ; lorsque, du choc des barbaries qui se succèdent, sont nés des idiomes nouveaux, alors la révolution de l’esprit humain paraît dans toute son immensité. Sur l’ancien territoire romain tout est changé, bouleversé ; ce ne sont plus des Gaulois, des Ibères devenus Romains ; ce sont des races nouvelles avec les variétés de leurs physionomies et de leurs langues ; c’est le chaos renaissant au milieu de cette uniformité que la conquête romaine avait commencée, et que semblait d’abord achever le christianisme.

Voilà l’état du monde, où il faut s’avancer, s’aventurer, pour apercevoir, à l’origine, les littératures et le génie des principaux peuples de l’Europe. J’ai restreint beaucoup cette tâche en l’essayant ; j’ai jeté la moitié de mon sujet, parce que je n’y entendais rien ; j’abandonne