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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/101

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

d’exemple à celle d’Horace[1] : « Je ne me soucie nullement, avait dit Archiloque, des trésors de l’opulent Gygès ; jamais je ne fus pris du sentiment de l’envie ; je n’ambitionne pas les grandeurs des Dieux, ni je n’aspire aux pompes de la tyrannie ; je la laisse bien loin en arrière de mes regards. »

À cette modération se joint l’abandon au destin, ou à la Providence. On sait comment Horace se console ou se moque, dans sa philosophie, des caprices du sort. Il avait lu dans Archiloque[2] : « Confiez tout aux Dieux. Souvent, du milieu des maux, ils relèvent les hommes abattus sur le sol noir de la terre ; souvent ils renversent et courbent, la tête en bas, ceux qui prospéraient ; puis arrivent de nouvelles misères ; et l’homme vague au hasard entre la vie qui lui manque et la raison d’où il s’écarte. »

Ailleurs, c’est seulement un éclat d’images qui rappelle la forte poésie d’Horace et ses allégories si courtes et si vives : « Regarde, avait dit Archiloque[3] : la mer profonde est soulevée dans ses flots. Sur le sommet des mâts un nuage s’est arrêté tout droit, signe de la tempête ; puis vient la terreur qui suit un danger subit. »

Quelquefois encore, ces restes brisés de la couronne du poëte grec ne sont que des traits rapides

  1. Poet. lyr. græc., ed. Bergk, p. 472.
  2. Ibid., p. 477.
  3. Ibid., p. 477.