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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/141

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

fondeurs de la mer tumultueuse et stérile, et, sur la terre chargée d’épis, ravageant les beaux sillons de l’homme, monte jusqu’à la demeure inaccessible des dieux et éclaircit la face du ciel, tandis que l’éclat du soleil reluit sur la terre fertile et ne laisse plus de vapeurs visibles aux yeux ; ainsi marche la vengeance de Jupiter. Il n’est pas chaque fois prompt à la colère, comme un homme mortel. »

Dans le calme de cette poésie, quelle autorité puissante ! Dans la leçon morale, quelle grandeur poétique ! Cette comparaison des prospérités coupables et passagères avec les nuées dont le ciel est obscurci, cette tempête du printemps qui les dissipe, et, au prix de quelques maux, rend la sérénité au ciel et une lumière féconde à la terre ; ce sont là des images dont la plus belle invention lyrique aimerait à se parer. On y sent cette haute gravité qui élève la poésie gnomique à l’enthousiasme des prophètes.

Ailleurs cette poésie plus simple nous donnera déjà l’image de la vie, comme la peignit chez les Hébreux le livre de la Sagesse, et comme la décrira quelque jour, dans une société plus raffinée, l’ingénieux Horace. Le poëte moral du siècle d’Auguste, le lyrique élégant et moqueur, n’est-il pas en effet devancé par ces vers du législateur d’Athènes dénombrant les occupations diverses des hommes ?

« Celui-ci, sur des navires, court à travers les mers, dans l’ardeur de rapporter son gain au logis, battu