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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/168

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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

le langage de ceux qu’Aristote appelle des naturalistes théologiens.

On peut alléguer, à l’appui de ce jugement, toute l’idée du poëme d’Empédocle appelé l’Expiation, ces accents sévères du poëte, ces pénitences prescrites, et en même temps cet éclat d’images et d’harmonie qui adoucit la menace, en la rendant plus persuasive. « Ô mes amis[1], disait-il, vous qui habitez la grande cité, les hauteurs de la blonde Agrigente, vous, zélateurs des bonnes œuvres, vous, asile ouvert aux étrangers, vous, ignorants du mal, salut ! Je viens à vous, dieu immortel, non plus homme ; je me mêle à la foule qui m’honore, paré, comme je le suis, de bandelettes et de guirlandes de fleurs. Là où j’arrive dans une ville peuplée, je suis vénéré des hommes et des femmes. Ils me suivent par milliers, demandant où est le sentier battu qui conduit au bonheur, les uns sollicitant des prédictions, les autres la guérison des maux divers qui les affligent. »

Ces promesses d’Empédocle lui donnaient un caractère d’oracle ou de magicien : « Quel secours, disait-il[2], peut écarter les maux et la vieillesse ? Tu l’apprendras, puisque pour toi je garde en dépôt de tels secrets. Tu feras tomber la fougue des vents indomptés, qui, lancés sur la terre, tuent les moissons de leur souffle ; et de nouveau, si tu le

  1. Emped. agrig., ed. Sturz., p. 530.
  2. Ibid.