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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/20

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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

pices : et toi aussi, Thalie, amoureuse du chant, vois cette fête s’avancer, sous une heureuse fortune. Car, pour chanter sur le mode lydien Asopique dans mes vers, je suis venu. Minyas, vainqueur à Olympie, l’est par toi. Va, maintenant, Écho, dans la noire demeure de Pluton, porter au père une glorieuse nouvelle ; et voyant Cléodème, dis-lui son fils, et comment, aux vallons de la célèbre Pise, il a couronné sa jeune chevelure des ailes de la victoire athlétique. »

Dans ce mot à mot qui ne déplaît pas, on aperçoit du moins quelque chose de l’original, son trait court et rapide, son mouvement facile et sa brièveté, sinon sa grâce. Mais, Lamotte, qui a tant abrégé Homère, se croyait obligé cette fois d’allonger Pindare. Le nom de Minyas lui inspirait une petite digression sur les Argonautes. Il ajoutait des ornements à cette poésie concise comme la perfection du goût. Il paraphrasait les idées, selon le juste reproche que lui fait l’abbé Massieu, qui se contente, lui, de paraphraser les mots.

Vers le même temps cependant, une main plus habile, formée du moins à l’école de la tradition classique, dont elle recueillait les nobles artifices, s’essaya sur le génie qu’Horace avait nommé jadis inimitable. Rousseau s’inspirait de Pindare, comme de David, sans beaucoup plus de foi à l’un qu’à l’autre. Il en reçut, non l’âme poëtique qui ne se donne pas, mais de belles parures de langage, quelques grains d’or pur, qu’il étendit en feuilles minces et brillantes dans le tissu de