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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/461

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

été consacré poëte par la religion et par l’amour.

À cette originalité première du Dante, à cet amour, à ce deuil, à ce culte de Béatrix, craindrons-nous d’ajouter une autre inspiration, qui dément toute une théorie de la critique moderne ? Il faut oser le redire : le poëte créateur du moyen âge est l’élève de l’antiquité. C’est qu’en dépit de la division systématique soutenue dans quelques ouvrages célèbres, il n’y a pas deux mondes distincts pour l’imagination, il n’y a pas deux grandes écoles égales et contraires ; il y a moins et plus. Le génie, sorti par élans de quelques sources qui ne changent pas, a d’infinis détours et des variétés sans fin. Le caractère du Dante, ce grand novateur, fut d’adorer Virgile, ce maître d’un langage si classique et si pur ; et il ne l’adora pas seulement, comme avait fait Stace, en l’imitant mal, en exagérant son élégance, en gâtant sa simplicité, en altérant sa passion. Tout pénétré de cette lumière, tout enchanté de cette poésie, il en réfléchit les rayons dans un idiome naissant à peine, et qu’il façonnait sous ce puissant modèle. L’art savant et passionné de Virgile répandu sans effort dans le langage royal et populaire que le nouveau poëte recueille de tous les coins de l’Italie, voilà l’inimitable beauté de la diction du Dante !

Mais, par là-même, cette diction si variée, si libre, souvent calme et sublime, parfois bizarre, toujours précise et nerveuse, faite pour le cœur et la pensée, ne devait rien avoir des langueurs et de la monotonie de