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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/572

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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

tincts de liberté et de justice contre le despotisme de la conquête et de l’opinion ; enfin, comme un dédommagement de tout, l’association plus ou moins apparente ou réelle du peuple assujetti dans les grandeurs du peuple conquérant assujetti lui-même.

La nation ingénieuse, jadis si forte, qui depuis tant de siècles a perdu son indépendance, n’avait pu sentir si près d’elle un exemple de nouveauté et d’audace comme celui de la France, sans être tentée de reprendre toutes les ambitions de la vie publique. Au premier aspect, l’invasion française de 1796 était pour l’Italie, non pas un joug étranger de plus, mais une renaissance nationale et politique. Bientôt le chef nouveau de l’invasion dut paraître un vengeur indigène ramené par la fortune des révolutions dans sa première patrie. Le pouvoir qu’il attaquait était odieux et suranné ; les étrangers qu’il avait à combattre, les cinq armées germaniques vaincues l’une après l’autre sur tous les points de l’Italie, semblaient un dernier reste de ces anciennes irruptions du Nord, que rejetait au delà des monts quelque général romain revenu à la hâte de la Gaule Narbonaise ou de la Grèce, un Marius, un Bélisaire.

Ne soyons pas étonnés de l’illusion enthousiaste qui se fit alors dans les esprits : reportons-nous à la grandeur de ce spectacle, tel que l’a décrit celui même qui en était le héros. Alors se conçoit tout ce que rêva l’Italie, tout ce que diront ses poëtes, jusqu’aux malé-