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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/573

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

dictions et aux apothéoses du fougueux et variable Monti. Cet ennemi acharné des Français à Rome était sincère, je le crois, dans le Barde de la Foret Noire, dans la Vision, alors qu’il célébrait en beaux vers l’affranchissement espéré de l’Italie sous le Consulat et même sous l’Empire. L’histoire explique assez ce qui manquait à cette œuvre, inaugurée par la suppression arbitraire d’un État libre, et par la création factice de démocraties nominales, puis promptement réduite à ce pouvoir absolu qui exploite les bras d’un peuple, mais ne le ranime pas.

Et toutefois cette courte épreuve ne pouvait être sans gloire pour l’Italie. Monti, Pindemonte, Manzoni, combien de noms encore honorèrent les arts dans ce beau pays, sinon reconstitué, du moins relevé par le maître de la France !

Entre ces noms célèbres, un seul nous paraît, plus que Monti, représenter la gloire poétique de l’Italie, et avoir donné par la noblesse de l’âme une vérité durable à l’éclat du talent. C’est le même homme qui, silencieux depuis vingt-cinq ans, vit paisible et triste sous la domination étrangère, dans sa ville natale, l’illustre Manzoni ; homme d’imagination et de foi, généreux patriote et chrétien résigné, poëte artificiel peut-être dans l’irrégularité de son théâtre, mais vraiment lyrique dans ses odes religieuses et dans celle que lui inspira le plus grand nom et la plus tragique destinée de ce siècle ! Déjà imitée dans notre langue,