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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/213

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monstre et il eut pour successeurs des idiots et des fous. L’État universel qui devait être l’incarnation de la Raison sociale elle-même était réalisé dans un fait absolument irrationnel dont l’absurdité n’était relevée que par le blasphème de l’apothéose impériale.

Le Verbe divin, uni individuellement à la nature humaine et voulant unir à Lui socialement l’être collectif de l’humanité, ne pouvait prendre comme point de départ de cette union ni la discorde d’une foule anarchique, ni l’arbitraire d’une tyrannie. Il ne pouvait s’unir à la société humaine qu’au moyen d’un pouvoir fondé sur la Vérité. Dans le domaine social, il ne s’agit pas directement et en premier lieu des vertus et des défauts personnels. Si nous considérons comme mauvais et faux le pouvoir impérial de la Rome païenne, ce n’est pas seulement à cause des forfaits et des folies des Tibères et des Nérons, c’est surtout parce que le pouvoir impérial lui-même, représenté soit par un Caligula, soit par un Antonin, était fondé sur la violence et couronné par le mensonge. L’empereur réel — créature improvisée des légionnaires et des prétoriens — n’était confirmé que par la force aveugle et grossière ; l’empereur idéal — celui de l’apothéose — était une fiction impie.

À l’homme-dieu faux de la monarchie politique le véritable Dieu-Homme opposa le pouvoir spirituel de la monarchie ecclésiastique basé sur la Vérité et l’Amour. La monarchie universelle, l’unité internationale devaient rester ; le centre d’unité