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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/219

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de Daniel est ordinairement appliquée à Jésus-Christ lui-même. Il est à remarquer pourtant que Jésus, en faisant un fréquent usage du prophète Daniel dans sa prédication, a pris chez ce prophète pour en faire l’application à sa personne, non pas l’image de la pierre, mais une autre désignation dont Il a fait presque son nom propre, — le Fils de l’Homme. C’est le nom même qu’il emploie dans le texte fondamental de saint Matthieu : quem dicunt homines esse Filium Hominis ? Jésus est le Fils de l’Homme vu par le prophète Daniel (Daniel, VII, 13) ; quant à la pierre (Daniel, II, 34, 35, 45), elle ne désigne pas directement Jésus, mais le pouvoir fondamental de l’Église, au premier représentant duquel le Fils de l’Homme lui-même a appliqué cette image : et moi je te dis que tu es Pierre.

Notre manière de voir est directement confirmée par le contexte de la prophétie de Daniel. Il y est question d’un Royaume venant de Dieu, mais cependant visible et terrestre, qui doit remplacer les grands empires païens après les avoir dominés et détruits. L’apparition et le triomphe de ce cinquième Royaume qui, dans un texte parallèle, est appelé « le peuple des saints du Très-Haut » (Daniel, VII, 18, 27) et qui est évidemment l’Église Universelle, sont symboliquement représentés par cette pierre qui après avoir brisé les pieds du colosse devient une grande montagne et s’étend sur toute la terre. Si donc « la pierre » de Daniel signifiait directement