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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/324

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Cette âme n’est en elle-même qu’une force indéterminée et désordonnée, mais capable d’aspirer à l’unité divine, désireuse de se réunir aux cieux. C’est sur ce désir qu’agissent le Verbe et l’Esprit de Dieu, en suggérant à l’âme ignorante les formes de plus en plus parfaites de la conjonction du céleste et du terrestre et en la déterminant à les réaliser dans le milieu du monde inférieur. Mais puisque l’âme de ce monde est en soi une dualité indéfinie (ἀόριστος δυάς), elle est aussi accessible à l’action du principe antidivin qui, n’ayant pu contraindre la Sagesse supérieure, obsède son antitype inférieur, l’âme du monde, — pour la forcer à demeurer dans le chaos et la discorde et, au lieu de réaliser en des formes harmoniques et régulièrement ascendantes la conjonction des cieux et de la terre, — à produire des monstres désordonnés et fantastiques. Ainsi le processus cosmique étant, d’un côté, la rencontre pacifique, l’amour et le mariage des deux agents — céleste et terrestre, — est, d’un autre côté, la lutte mortelle entre le Verbe divin et le principe infernal pour la possession de l’âme du monde. Il s’ensuit que l’œuvre de la création, en tant que processus doublement compliqué, ne peut se produire que d’une manière lente et graduée.

Qu’elle n’est pas l’œuvre immédiate de Dieu, la Bible vient de nous le dire formellement. Et cette parole sacrée est amplement confirmée par le fait.