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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/325

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Si la création de notre monde physique émanait directement et exclusivement de Dieu Lui-même, elle serait une œuvre absolument parfaite, — une production calme et harmonique, non seulement dans le tout, mais dans chacune de ses parties.

Mais la réalité est loin de répondre à une telle idée. Ce n’est qu’à son point de vue qui embrasse tout (kol asher hosah) d’un seul regard — sub specie æternitatis — que Dieu peut déclarer la création parfaite — tob méod, valde bona. Quant aux différentes parties de l’œuvre considérées en elles-mêmes, elles ne méritent dans la parole de Dieu qu’une approbation relative ou n’en méritent pas du tout. En cela comme dans tout le reste la Bible est d’accord avec l’expérience humaine et la vérité scientifique. Si nous considérons le monde terrestre dans son état actuel et surtout dans son histoire géologique et paléontologique, très bien documentée de nos jours, nous y découvrons un tableau caractérisé d’un processus laborieux, déterminé par des principes hétérogènes qui n’arrivent qu’à la longue et par de grands efforts à une unité stable et harmonique. Rien ne ressemble moins à une œuvre absolument parfaite provenant immédiatement d’un seul artifex divin. Notre histoire cosmique est un enfantement lent et douloureux. Nous voyons là des signes manifestes d’une lutte intérieure, des secousses et des convulsions violentes, des tâtonnements aveugles, des ébauches inachevées de