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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/345

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essentielle, entre ces trois modes constitutifs de l’existence humaine et les trois modes correspondants de l’existence divine (sans parler du caractère hypostatique de ces derniers). La raison générale de cette différence est qu’en Dieu, comme être absolu, le premier mode détermine totalement le second, et les deux ensemble déterminent totalement le troisième, dans lequel l’être divin se possède définitivement et jouit de soi-même d’une manière complète. L’homme au contraire, — pour ne mentionner ici que le troisième mode de sa subjectivité — ne peut posséder actuellement la totalité d’existence qui n’est pour lui qu’un avenir plus ou moins éloigné. Cet avenir idéalement anticipé ne peut pas être l’objet d’une jouissance proprement dite, mais seulement d’une aspiration.

Dans notre vie matérielle ou animale, cette forme trinitaire existe déjà, mais elle y est plutôt un symbole naturel qu’une réalité. Le fait accompli est représenté ici par la génération passée, les pères ou les anciens ; l’actualité, c’est la génération présente, les hommes d’aujourd’hui ; enfin les aspirations naturelles vers l’avenir s’incarnent dans les enfants, dans la génération future. On voit bien que la forme trinitaire a ici un caractère purement relatif et au fond illusoire : la vie naturelle s’efforce de fixer les termes du rapport, mais elle n’y parvient jamais, et chaque génération passe également par l’état de l’avenir, de l’actualité et du passé, pour dispa-