Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/364

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classe guerrière une grande partie de sa prédominance, mais elle en garda assez pour arrêter le libre développement de la vie nationale. Cette lutte fut compliquée par l’action croissante du troisième des ordres sociaux[1] — les sages qui, en s’éloignant de plus en plus de la doctrine orthodoxe et de la discipline traditionnelle, finirent par entrer en antagonisme ouvert avec les Brahmanes. La classe militaire ou royale se divisa dans cette lutte, mais elle finit par prendre parti pour les représentants du passé ; et les prophètes hindous — les sages du Bouddhisme, après des persécutions cruelles, furent expulsés de l’Inde. Si, d’un côté, la sagesse négative du Bouddhisme, hostilement opposée au présent et au passé, n’était qu’une utopie vide et stérile ; d’autre part, le sacerdoce et la royauté, en se coalisant contre le nouveau mouvement de la pensée et en le supprimant par la violence, ont privé l’Inde de toute liberté et lui ont ôté toute possibilité de progrès historique. Malgré la supériorité de la race aryenne, malgré les grandes qualités du génie national, l’Inde est restée depuis lors une esclave impuissante, se donnant sans résistance à tous les maîtres qui ont voulu d’elle.

L’origine de la culture indienne est signalée par la prédominance de la classe sacerdotale, repré-

  1. Il va sans dire que la division des castes indiennes est un phénomène local qu’on ne doit pas confondre avec les trois ministères dirigeants qui existent dans toute société.