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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/408

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considérables. La perfection de l’amour social ne peut donc pas consister dans l’intensité du sentiment subjectif, mais dans sa conformité avec la raison objective qui nous dit que le tout est plus grand que chacune de ses parties. Le devoir de cet amour est donc enfreint et la réalisation de l’homme social est empêchée non seulement par le simple égoïsme, mais aussi et surtout par le particularisme qui nous fait séparer l’intérêt des groupes inférieurs, auxquels nous sommes rattachés plus étroitement, et l’intérêt des groupes supérieurs et plus larges. Quand on sépare l’amour pour sa famille, sa corporation, sa classe sociale ou son parti politique, de l’amour pour sa patrie, ou quand on veut servir cette dernière en dehors de l’humanité ou de l’Église Universelle, on sépare ce que Dieu a uni et on devient un obstacle à l’intégration de l’homme social.

Le type et la réalité fondamentale de cette intégration sont donnés dans la hiérarchie ecclésiastique formée par le sacrement de l’Ordre. C’est le triomphe de l’amour social, car aucun membre de cet ordre ne fonctionne et n’agit de soi-même ou en son nom ; chacun est ordonné et investi par un supérieur, représentant d’une unité sociale plus large. Depuis le prêtre le plus humble jusqu’au pape, — le serviteur des serviteurs de Dieu, — tous sont ici, quant à leur ministère sacré, absolument purs de l’égoïsme qui s’affirme et du particularisme