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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/91

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dans ce que nous considérons comme le plus essentiel. Quant au contraste profond que présente la piété contemplative de l’Orient avec la religion active des Occidentaux, ce contraste subjectif et purement humain n’a rien à voir avec les objets divins de notre foi et de notre culte, et, loin d’être un juste motif de séparation, il devrait plutôt porter les deux grandes parties du monde chrétien à une réunion plus intime pour se compléter mutuellement.

Mais sous l’influence du mauvais principe qui ne cesse d’agir ici-bas, on a abusé de la différence pour en faire une division. Et au moment où la Russie recevait le baptême de Constantinople, les Grecs, quoique formellement en communion encore avec Rome après le schisme temporaire de Photius[1], étaient déjà fortement imbus du particularisme national nourri par la rivalité hiérarchique, par la politique des empereurs et les querelles d’école. Il s’ensuivit que le peuple russe dans la personne de saint Vladimir acheta la perle évangélique toute couverte de la poussière byzantine. Le corps de la

  1. La rupture définitive qui n’a eu lieu que plus tard, en 1054, n’a été du reste qu’un simple fait sans aucune espèce de sanction légale et obligatoire, puisque l’anathème des légats du pape Léon IX n’était pas dirigé contre l’Église Orientale, mais uniquement contre la personne du patriarche Michel Cérullaire et contre « les partisans de sa folie » (folie assez manifeste à vrai dire) ; et, de son côté, l’Église Orientale n’a jamais pu rassembler un concile œcuménique qui, selon nos théologiens eux-mêmes, est le seul tribunal compétent pour juger nos différends avec la papauté.