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Page:Vogüé - Cœurs russes, 1893.djvu/138

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les yeux : ainsi gisent en lui toutes mes espérances, mortes.

Nous attendons les événements dans ce charnier de Plevna. Tout est désolation autour de nous. L’hiver est venu ajouter ses cruautés à celles des hommes. Je n’aurais jamais imaginé que la nature pût être si ingénieuse à varier les souffrances. Elles m’enveloppent comme un élément sensible, un air empoisonné. Les premiers temps, mes nerfs effroyablement tendus me soutenaient ; maintenant, ils sont las et blasés, je remplis ma tâche machinale avec des intervalles d’accablement, des nausées de dégoût moral. Les combattants, du moins, sont stimulés par le sentiment du danger, par les nécessités de la lutte ; et puis on électrise ces pauvres gens avec un signe de croix, avec quelques paroles sonores. Le spectateur n’a pas le secours de l’action ; et celui qui pense ne